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France Arets,
militante et porte-parole du Collectif de Résistance Aux Centres Pour Étrangers (CRACPÉ)
Cinq revendications pour une justice migratoire
À l’approche des élections fédérales et européennes, le Collectif liégeois de soutien aux sans-papiers propose aux différents partis politiques, mais aussi à l’ensemble des citoyen·nes, un programme de cinq revendications autour de la politique migratoire.
L’État belge est devenu une « fabrique » de sans-papiers. En effet, les décisions mises en œuvre ces dernières années, tant sur le plan national qu’européen, en matière de politique migratoire (droit d’asile, accès au territoire et titres de séjour, droit du travail, détention des personnes migrantes…) ont échoué à apporter des solutions tout autant bénéfiques pour la Belgique que respectueuses des droits humains.
Au terme de cette législature, il est indéniable que les personnes demandant un titre de séjour en Belgique continuent de faire face à des procédures destructrices et arbitraires. Qu’il s’agisse de personnes demandeuses de protection internationale ou en attente de régularisation, ces personnes sont toujours privées de leurs droits fondamentaux.
Or, il est crucial de reconnaître que ne pas accueillir dignement ces personnes est préjudiciable pour la société belge. Autoriser ces personnes au séjour participerait à les faire contribuer davantage à l’économie de la Belgique, notamment dans des secteurs en pénurie de main d’œuvre, à augmenter les recettes fiscales et à diminuer la fraude sociale, et à renforcer le tissu social belge. Certains États européens, comme l’Allemagne tout récemment, ont déjà compris cette réalité en mettant en place des dispositifs de régularisation.
Revendiquer une amélioration des politiques migratoires actuelles, c’est donc construire un modèle de société plus juste pour toutes et tous. Nos futur·es dirigeant·es doivent réaffirmer que des choix solidaires et pleinement respectueux des droits humains sont possibles et qu’il est temps d’en finir avec les politiques basées sur la peur de l’autre, qui ne répondent en rien aux défis sociétaux d’aujourd’hui et encore moins de demain.
Pour changer de cap, en tant que membres de la plateforme nationale pour une politique migratoire positive In My Name, nous demandons dès lors :
- Un élargissement significatif des voies d’accès au séjour légal en Belgique y compris par le travail, afin de respecter les droits fondamentaux et de répondre aux besoins de notre société sur les plans économique, démographique, social et culturel. Cette nécessité s’inscrit dans la réalité des défis migratoires, pour des causes économiques, climatiques ou de sécurité, auxquels il est impératif de répondre.
- La dépénalisation du séjour irrégulier, en supprimant l'article 75 de la loi du 15 décembre 1980, condition sine qua non pour que les personnes puissent faire valoir leurs droits à la vie familiale, à la santé, au logement, à l’éducation, à la formation et bien sûr la lutte contre l’exploitation économique.
- La régularisation des personnes sans-papiers qui vivent en Belgique grâce à des critères clairs de régularisation pour raisons humanitaires telles que les attaches durables, l’employabilité, l'inéloignabilité ou le risque d’atteinte à un droit fondamental en cas de retour, ainsi que la création d’une Commission indépendante de régularisation chargée de l’analyse des demandes de régularisations pour raisons humanitaires.
- Mettre fin à la détention des personnes migrantes pour des motifs administratifs, et cesser les expulsions, piliers d’une politique répressive, inefficace et extrêmement coûteuse pour l’État belge, dont l’existence même contrevient aux libertés fondamentales et génère des atteintes quotidiennes aux droits et à la dignité humaine.
- Une opposition de la Belgique au Pacte sur l’asile et les migrations, et notamment : à la « solidarité obligatoire mais flexible » dans le règlement Dublin III, dispositif de marchandage de vies humaines ; à la procédure de « filtrage », qui méprise la Convention de Genève et créé des camps d’enfermement aux frontières ; à la restriction des procédures équitables d’asile et de protection ; à la coopération avec des pays tiers où les droits humains ne sont pas respectés. La vulnérabilité des individus, le principe de non-refoulement, et le droit à la liberté de circulation doivent être réaffirmés fermement par la Belgique, notamment en refusant d’appliquer le règlement Dublin III.
Le Centre d’Action Laïque de la Province de Liège fait partie des signataires de cet appel porté par le Collectif liégeois de soutien aux sans-papiers.
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