• Pierre Spehl
    Pierre Spehl
    président du Centre d’étude et de défense de l’école publique (CEDEP)

Le cours commun : une revendication du CEDEP

Les 12 asso­cia­tions d’enseignants, de direc­teurs d’écoles, de pouvoirs orga­ni­sa­teurs, de parents et de sympa­thi­sants de l’école publique, fédé­rées au sein du Centre d’étude et de défense de l’école publique (CEDEP), reven­diquent depuis 2010 la créa­tion dans tout l’enseignement obli­ga­toire d’un cours commun de forma­tion citoyenne qui se fonde sur une approche philo­so­phique et sur une connais­sance histo­rique des reli­gions et des mouve­ments de pensée non confes­sion­nels, permet­tant aux élèves d’exercer libre­ment leur esprit critique.


Le CEDEP (NDLR : dont le Centre d’Action Laïque fait partie) propose d’appeler ce cours commun « Éduca­tion philo­so­phique, éthique et citoyenne » pour rencon­trer trois demandes et exigences bien spécifiques.

CC-BY-NC-SA Flickr​.com – Usag Humphreys

Tout d’abord, une éduca­tion philo­so­phique sous une forme appro­priée à tout âge et dès l’école fonda­men­tale, par exemple au moyen de dispo­si­tifs recen­sés sous l’appellation de « philo­so­phie pour les enfants ». Cette partie du cours visera à ques­tion­ner, penser, réflé­chir, argu­men­ter, infé­rer, induire, sérier, clas­ser, concep­tua­li­ser, problé­ma­ti­ser… Elle visera aussi à faire progres­si­ve­ment discer­ner chez les élèves  les énon­cés qui relèvent de l’exactitude ou de l’erreur (épis­té­mo­lo­gie), ceux qui prétendent au bien et au juste (philo­so­phie morale et philo­so­phie du droit) et d’autres encore, évalua­tifs et expres­sifs, qui relèvent de la subjec­ti­vité des préfé­rences et de l’esthétique.

Il s’agit ensuite, d’amener les élèves à exer­cer le ques­tion­ne­ment et la réflexion éthiques tels qu’ils sont requis pour légi­fé­rer et se posi­tion­ner dans la sphère publique sur les ques­tions du bien et du juste. Le but : déve­lop­per prin­ci­pa­le­ment les compé­tences à se décen­trer et à écou­ter des points de vue éthiques diffé­rents du sien propre, à pouvoir respec­ter le plura­lisme éthique sans renon­cer à argu­men­ter ses choix éthiques propres, poser des choix éthico-poli­tiques après réflexion et discus­sion des points de vue.

Le but : déve­lop­per prin­ci­pa­le­ment les compé­tences à se décen­trer et à écou­ter des points de vue éthiques diffé­rents du sien propre, à pouvoir respec­ter le plura­lisme éthique sans renon­cer à argu­men­ter ses choix éthiques propres, poser des choix éthico-poli­tiques après réflexion et discus­sion des points de vue.

Enfin, une éduca­tion à la citoyen­neté respon­sable répon­dra au souhait du légis­la­teur de la Fédé­ra­tion Wallo­nie-Bruxelles, exprimé dans le Décret Missions et le Décret Citoyen­neté, que  le cours commun remplisse cette mission pendant toute la scola­rité obligatoire.

Avec la mondia­li­sa­tion et le multi­cul­tu­ra­lisme des socié­tés, le CEDEP pense que le moment est venu de garan­tir un lieu et un cours commun à tous les élèves pour que puisse s’y trans­mettre de façon critique et réflexive l’histoire de nos valeurs parta­gées et de nos prin­cipes démo­cra­tiques tout en veillant à remplir l’objectif de socia­li­sa­tion dévolu à l’école moderne, un espace commun où penser et construire le vivre ensemble dès le plus jeune âge, malgré des convic­tions privées différentes.

Cette partie du cours visera à déve­lop­per prin­ci­pa­le­ment les compé­tences à l’autonomie indi­vi­duelle (la capa­cité à penser par soi-même, à juger par soi-même et à régu­ler ses émotions, la capa­cité à exer­cer son esprit critique, à éviter les para­lo­gismes et les sophismes pour argu­men­ter avec rigueur), les compé­tences à la coopé­ra­tion sociale (habi­le­tés coopé­ra­tives, compé­tences commu­ni­ca­tion­nelles d’écoute et d’expression) et les compé­tences à la parti­ci­pa­tion publique (légi­fé­rer au niveau où l’on se trouve dans l’égalité de droit, prendre la parole, écou­ter, argu­men­ter, se posi­tion­ner, convaincre, se lais­ser convaincre, répondre de ses choix…, bref faire acqué­rir à la majo­rité civile les compé­tences qui permettent au citoyen d’exercer ses droits poli­tiques au sein des insti­tu­tions démocratiques).

Le nouveau cours commun s’adresse à tous les élèves, quelles que soient leurs convic­tions philo­so­phiques ou reli­gieuses, il porte sur ce qui unit et non sur ce qui divise.

Ces trois compé­tences sont  reliées aux trois grandes valeurs démo­cra­tiques, à savoir l’autonomie indi­vi­duelle se lie à la liberté, la coopé­ra­tion sociale à la soli­da­rité et la parti­ci­pa­tion publique à l’égalité de droit.

Le nouveau cours commun s’adresse à tous les élèves, quelles que soient leurs convic­tions philo­so­phiques ou reli­gieuses, il porte sur ce qui unit et non sur ce qui divise. Pour le donner, les ensei­gnants devront être formés spéci­fi­que­ment au préa­lable : c’est la condi­tion sine qua non de sa réussite.

Sa mise en œuvre suppose que soit suppri­mée l’obligation légale faite actuel­le­ment aux enfants de fréquen­ter un des cours dits « philo­so­phiques » orga­ni­sés dans l’enseignement offi­ciel, obli­ga­tion qui contre­vient aux droits cultu­rels garan­tis par les Conven­tions euro­péennes et inter­na­tio­nales rati­fiées par la Belgique.


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