- Olivier Schümmer,
animateur EVRAS au SIPS - Christine Lilot,
médecin et coordinatrice au SIPS
Un retour du terrain
Le SIPS est un planning familial, situé au centre de Liège, qui s’adresse prioritairement aux jeunes jusqu’à 25 ans. Olivier Schümmer est thérapeute systémique et familial ainsi qu’animateur EVRAS. Il est confronté aux questionnements et préoccupations des jeunes concernant leur vie relationnelle, affective et sexuelle. Christine Lilot est médecin et coordinatrice du planning. Elle reçoit les jeunes en consultations médicales. Ensemble, ils nous proposent un focus sur le terrain.
Salut & Fraternité : Quelles sont les questions posées par les jeunes lors des animations EVRAS et ont-elles évolué avec le temps ?
Olivier Schümmer : Les préoccupations restent sensiblement identiques même si certains éléments de société évoluent. Ce qui est le plus frappant, c’est qu’aujourd’hui les jeunes sont beaucoup plus informé·es. Par exemple, il y a quelques années, nous informions sur l’homosexualité, la bisexualité, le genre, etc. Aujourd’hui, ce sont les jeunes qui amènent les questions des attirances sexuelles, amoureuses et des identités de genres. Évidemment, les technologies permettent un accès à toutes ces informations plus aisément. Les minorités sexuelles et de genres sont davantage visibles et visibilisées dans la société grâce aux médias et aux réseaux sociaux. Lors des animations, nous sommes autant dans le débat que dans l’information. D’autres préoccupations et anxiétés liées à l’avenir reviennent aussi régulièrement : les relations sexuelles et le rapport au corps mais aussi les perspectives d’emploi, l’écologie, etc.
Ce qui est le plus frappant, c’est qu’aujourd’hui les jeunes sont beaucoup plus informé·es.
S&F : Avec Internet et les réseaux sociaux, les jeunes ont accès à l’information mais sont-ils et elles mieux informé·es ?
O.S : Non pas toujours, évidemment. C’est aussi une part importante de notre travail en animation. On voit, encore aujourd’hui, toute l’importance de l’existence des plannings et des animations EVRAS. Les réseaux sociaux peuvent aider ou au contraire ne pas aider du tout ! Il y a beaucoup de choses qui circulent et on ne vérifie pas forcément les sources. Nous faisons aussi de l’éducation aux médias. Le fait qu’ils/elles aient peu d’espaces pour parler de ces sujets renforce aussi la mauvaise information. La plupart du temps, les jeunes en parlent ensemble, mais semblent peut-être dans la confrontation, dans le « Je ne suis pas d’accord avec toi ». Les animations permettent de faciliter le débat entre jeunes. Nous partons de leurs échanges pour déconstruire certaines idées reçues et soulever des questions en lien avec la sexualité, la vie relationnelle, affective et l’amour, toujours dans un souci d’information et sans jugement.

S&F : Au-delà de ces préoccupations, comment les jeunes envisagent-ils leurs relations amoureuses ?
Christine Lilot : Les relations me semblent plus équilibrées, notamment au niveau de la contraception. De plus en plus de partenaires soutiennent ou participent financièrement ou souhaitent être présent·es lors de la consultation gynécologique. Il y a vraiment une attention particulière sur « comment mon ou ma partenaire vit sa sexualité au niveau médical ». Je pense que « les féminismes » ont tout de même semé leur graine ! Beaucoup de jeunes sont sensibles au consentement et y font attention. Évidemment, les jeunes qui poussent la porte du planning sont déjà sensibilisé·es et il y a déjà une volonté de prendre soin de l’autre. En tant que planning, nous sommes aussi identifiés comme une structure qui milite pour certains droits et qui est issues des mouvements féministes. Ça teinte également le public avec lequel on travaille. Ce n’est donc pas n’importe qui qui vient en consultation au planning. Ce que l’on voit, c’est la pointe de l’iceberg.
S&F : D’où l’importance des animations EVRAS ?
O.S : En effet, les animations nous permettent de sensibiliser un public plus large et diversifié. Les débats sont souvent mouvementés. On peut se retrouver face à des jeunes aux avis très divergents, parfois radicalisés, voire violents. On nourrit les échanges en partant de leurs discours, influencés par leurs représentations, leurs valeurs et leurs croyances pour susciter un esprit critique. Ce n’est pas toujours simple mais c’est essentiel ! Les animations EVRAS permettent aux jeunes de parler, de poser des questions, de s’informer et de débattre. Nous sommes là pour les soutenir dans cette démarche et répondre aux mieux à leurs interrogations.
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