• Robin Lebrun
    Robin Lebrun
    collaborateur scientifique au Centre d'Etude de la Vie Politique (Cevipol) à l’Université Libre de Bruxelles

la majorité électorale à 16 ans : une bonne idée ?

Pour la première fois le 9 juin prochain, les jeunes de 16 et 17 ans auront la possibilité de prendre part à l’élection des députés européens. Les jeunes n’étaient pas demandeurs de ce changement. C’est ici une initiative du politique qui justifie la réforme par une volonté d’apporter un renouveau démocratique en renforçant la participation des citoyens.


Un nombre croissant de territoires donne la possibilité de voter dès 16 ans, bien que cela reste très minoritaire. Parmi ceux qui ont franchi le pas, on peut citer le Brésil, l’Équateur, l’Argentine, l’Écosse, le Pays de Galles, l’Autriche, Malte, la Grèce (17 ans), ainsi que certains Länder allemands. Il est à noter que dans certains pays, le droit de vote à 16 ou 17 ans n’est octroyé que pour certains niveaux de pouvoir, contenant souvent ce droit aux élections de second ordre que sont les élections municipales ou européennes.

Cet abaissement de la majorité électorale fait toujours débat, y compris dans la littérature scientifique, d’autant qu’on manque encore de recul pour analyser les effets à long terme de ce changement. Certains pointent le manque de maturité des jeunes de 16 ans et 17 ans. Ils n’auraient pas un niveau de connaissance et un intérêt politique suffisants pour pouvoir poser un choix informé. Toutefois, plusieurs études réalisées dans les pays qui ont abaissé l’âge nécessaire pour voter amènent des résultats encourageants. Ainsi, en Écosse, l’élargissement du corps électoral aux 16-17 ans lors du référendum d’indépendance a mené à une augmentation de la participation politique de ces jeunes, que ce soit lors de l’échéance électorale suivante, mais aussi en dehors des urnes. En Autriche, on remarque que les taux de participation des 16-17 ans ont été plus importants que celui des jeunes plus âgés, tandis que leur niveau d’intérêt pour la politique s’est renforcé.

Il y a des raisons de penser que l’âge de 16 ans est plus adapté comme seuil de participation. D’abord, parce qu’une participation électorale plus précoce peut permettre le développement d’une véritable habitude de participation à long terme. La première expérience de vote représente un apprentissage important et qui est renforcé s’il n’a pas lieu trop tard. On sait en effet que l’adolescence constitue un moment clé de la socialisation politique des individus, les attitudes politiques tendant à se figer ensuite. Deuxième avantage, à 16-17 ans, la plupart des jeunes fréquentent encore l’école, qui peut alors jouer un rôle important d’accompagnement à l’exercice de ce droit. Et c’est tout l’enjeu : pouvoir donner les moyens à tous de s’approprier la démocratie. En agissant plus tôt tout en éduquant, on peut améliorer les connaissances politiques tout en sensibilisant les individus. Cela rend caduques les critiques pointant un manque de maturité politique des individus, qui, à supposer qu’il soit l’exclusivité ou davantage présent auprès des jeunes — ce qui est discutable —, est le produit d’un système ayant failli à éduquer à ces enjeux.

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