• Fatima Shaban
    Fatima Shaban
    coordinatrice de la Maison de la Laïcité d’Angleur
Propos recueillis par Dorothy Bocken

La Maison de la laïcité d’Angleur, une maison où il fait bon vivre ensemble !

La Maison de la Laïcité d’Angleur Chênée et Grivegnée (MLACG) est installée face à l’église d’Angleur. Personne ne peut l’ignorer : elle s’annonce fièrement via le bandeau rouge vif qui orne toute sa façade. Elle est ouverte tous les jours, et chaque citoyen y est le bienvenu tant l’accueil est chaleureux et basé sur la convivialité.

Comme chaque Maison de la Laïcité, elle propose divers services tels que les cérémonies laïques. Elle coordonne notamment l’organisation de la Fête de la Jeunesse Laïque sur le territoire depuis de nombreuses années, et ce grâce à la motivation et à la disponibilité de ses bénévoles. Depuis très longtemps, elle organise également des conférences et des débats sur tous les thèmes chers aux laïques, qui fournissent un éclairage critique sur l’actualité.

Le lieu est aujourd’hui devenu une Maison de quartier qui, au travers de ses nombreuses activités, diffuse les valeurs de la laïcité dont le vivre ensemble, à travers la tolérance, la solidarité, la fraternité, l’écoute et l’esprit critique. L’autonomie et l’émancipation sont également au cœur des préoccupations des responsables.

Un travail à grande échelle, puisque près de 150 personnes poussent la porte de l’association chaque semaine pour participer aux animations.


Entretien avec

Fatima Shaban

les ateliers d’émancipation féminine, une formidable expérience

Salut & Frater­nité : Comment s’est passée l’ouverture des ateliers au sein de la Maison de la Laïcité ?

Fatima Shaban : Le premier atelier a ouvert ses portes il y a quatre ans. Il était destiné aux femmes et, souli­gnons-le, a été créé à leur demande bien précise : orga­ni­ser un atelier cuisine. Les ateliers ont donc démarré sous l’impulsion des habi­tantes. À l’heure actuelle, il en existe une dizaine de toutes sortes : réser­vés aux femmes, mixtes, inter­gé­né­ra­tion­nels, artis­tiques, cultu­rels, éducatifs…

S&F : Quatre ans après, ce premier groupe de femmes est-il toujours au rendez-vous ?

F.S. : Abso­lu­ment ! Le petit noyau de départ s’est agrandi et l’atelier a évolué en une formi­dable amitié pour la plupart d’entre elles. Elles ont demandé d’autres acti­vi­tés. Certaines viennent cuisi­ner lors de nos confé­rences. La mise en avant de leurs compé­tences est un véri­table moteur pour leur confiance en elles ! La majo­rité d’entre elles vient aux autres acti­vi­tés et certaines sont parties plusieurs fois en excur­sion avec nous.

S&F : Comment gérer la multi­cul­tu­ra­lité et l’intergénérationnel ?

F.S. : Le groupe est en effet multi­cul­tu­rel et inter­gé­né­ra­tion­nel : il compte près de dix natio­na­li­tés diffé­rentes et les âges sont vrai­ment variés. Pour la Maison de la Laïcité, il est impor­tant de répondre dans la mesure du possible à ce type de demande, en se basant sur le partage de nos valeurs. Chaque parti­ci­pant reçoit ainsi une infor­ma­tion sur la laïcité, sa signi­fi­ca­tion et son impor­tance pour permettre à chacun de coexis­ter dans le respect de l’autre. Les règles sont très claires dès le début, et la première est que la reli­gion, les convic­tions et les signes distinc­tifs quels qu’ils soient, restent à la maison. Chaque parti­ci­pant reçoit d’ailleurs une charte et doit y adhérer.

Rendre à ces femmes une place et un rôle parti­cu­lier était bien sûr une évidence. C’est à notre sens une des voies qui mènent à l’autonomie et l’émancipation.

Parti­ci­per à un atelier à la Maison de la Laïcité a un réel sens. Rendre à ces femmes une place et un rôle parti­cu­lier était bien sûr une évidence. C’est à notre sens une des voies qui mènent à l’autonomie et l’émancipation. Ce n’est évidem­ment pas unique­ment valable pour les femmes : chacun d’entre nous devrait être acteur de sa vie et pouvoir faire des choix avec toute les connais­sances néces­saires pour y parvenir.

S&F : Comment avez-vous procédé ?

F.S. : Le travail effec­tué par l’association au sein du groupe est basé sur la confiance. La plupart des parti­ci­pantes étaient isolées et assez acca­pa­rées par leurs problèmes socio-écono­miques plus ou moins impor­tants. L’atelier cuisine est en quelque sorte un prétexte pour se retrou­ver, discu­ter, échan­ger sur les diffi­cul­tés du quoti­dien. De discus­sion en discus­sion, d’autres sujets tels que l’égalité hommes-femmes, les problèmes de violences conju­gales, etc., sont abor­dés. Venir à la Maison de la Laïcité est une possi­bi­lité aussi pour certaines d’entre elles de sortir de leurs murs. Certaines femmes en ont vrai­ment besoin. Il leur manque souvent un espace de parole où elles peuvent discu­ter libre­ment sans être jugées. À ce titre, la laïcité est un atout incon­tes­table pour les femmes, puisqu’elle permet l’égalité.

Préci­sons que nous ne créons pas de groupes spéci­fiques hommes ou dames. Ce n’est pas le but ! Mais l’idéal est de garder un espace de paroles exclu­si­ve­ment fémi­nin pour que chacune d’entre elles puisse s’exprimer libre­ment. Ce n’est pas forcé­ment d’emblée évident !

Une fois la confiance établie, le groupe s’est ouvert à des inter­ve­nants exté­rieurs, et donc bien sûr aux hommes. Certains sont venus cuisi­ner aussi et d’autres ont été invi­tés en tant qu’intervenants exté­rieurs sur des sujets divers.

Une fois la confiance établie, le groupe s’est ouvert à des inter­ve­nants exté­rieurs, et donc bien sûr aux hommes. Certains sont venus cuisi­ner aussi et d’autres ont été invi­tés en tant qu’intervenants exté­rieurs sur des sujets divers. Parce que l’émancipation passe aussi par l’élargissement des connais­sances et l’accès à l’éducation : savoir ce qui se passe dans sa commune, dans sa ville, dans son pays, quels sont ses droits et ses devoirs, comment est orga­ni­sée notre poli­tique… Nous avons alors orga­nisé en complé­ment à l’atelier des moments d’échanges sur des thèmes variés tels que les droits humains, l’égalité hommes-femmes, l’emploi, le chômage, les pensions, l’administration, le logement…

S&F : C’est un bilan posi­tif pour la MLACG ?

F.S. : Tout à fait ! Ces ateliers nous ont vrai­ment permis d’accueillir un autre public, de sortir de nos habi­tudes et de faire décou­vrir la laïcité au plus grand nombre par un ces biais-là ! Et une des clés de cette réus­site, c’est le fait que nous sommes partis de la demande des parti­ci­pants, aussi bien hommes que femmes, d’ailleurs !

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