• Philippe Coenegrachts
    directeur de la Bibliothèque Centrale « Les Chiroux »

Livre, démocratie et service public : « Le plan de développement de la lecture »

Aujourd’hui, les bibliothèques publiques de la Communauté française sont face à ce qui peut ressembler à une forme de révolution copernicienne. Cette dernière prend la forme du plan de développement de la lecture. Dans les grandes lignes, ce plan vise à déplacer les missions de ces institutions d’une gestion basée sur leur structure pour arriver à une politique de lecture centrée sur le savoir et les usagers au cœur de leur territoire.

Le plan de développement n’est pas une nouveauté, il était d’ailleurs prévu dans le précédent décret mais ne portait que sur un, deux ou trois ans en fonction de la catégorie de reconnaissance sollicitée. Le nouveau décret sur la lecture publique prévoit la mise en place de plans quinquennaux de développement, programme d’action d’une durée minimale de cinq ans établi en vue de réaliser l’objet du décret. Ces plans quinquennaux visent tant la population que les acteurs associatifs et institutionnels.

Ce décret vise à favoriser l’accès à la culture et au savoir par la mise à disposition de ressources documentaires et culturelles, sur tous supports matériels et immatériels, de même qu’à permettre leurs utilisations multiples par le plus grand nombre.

Un plan sur cinq ans !

Tâche ardue que la rédaction d’un tel plan, voire même impossible pour certains. C’est pourquoi un programme de formation et d’accompagnement a été mis en place par la Communauté française pour permettre à chaque biblio- thèque de réfléchir à ses enjeux, à ses objectifs et à ses stratégies.

Structurer son action, la situer par rapport aux grands enjeux de société, sortir la bibliothèque de ses murs, penser en termes de partenariats, travailler en réseau, au- tant de défis qui sont lancés aux acteurs de la lecture publique.

Et ces défis, les bibliothèques les relèvent, petit à petit, elles multiplient les actions, les program- ment sur des durées de plus en plus longues, ajoutent à chaque fois de nouveaux partenaires. Elles prennent confiance en elles, se sentent de moins en moins esseulées, ne se considèrent plus comme des ignorées de la culture mais prennent la place qui leur revient dans le tissu culturel.

Travailler en réseau, une nouvelle manière de penser, de monter des projets, de développer une action. Avant cela faisait peur, peur d’être la cinquième roue de la charrette, peur de perdre ses spécificités, peur d’aborder de nouveaux domaines d’action.  Et puis au fil du temps on découvre que les complémentarités existent, que le centre culturel voisin ou la maison de jeunes a des publics et des objectifs parallèles voire similaires. Alors on se parle dans un premier temps, on émet une idée, on élabore un projet, on se partage les tâches, on s’ouvre à l’autre et au final, on découvre que cela fonctionne.

C’est dans cet esprit que les pro- jets pluriannuels ont été lancés par la Communauté française, permettre à chaque bibliothèque d’élaborer un plan d’action portant sur plusieurs années dans un domaine bien spécifique, choisi en fonction des besoins de son public et de ses spécificités, et ça marche ! nombreuses sont les bibliothèques qui se sont lancées dans de tels projets et qui voudraient surtout pouvoir les pour- suivre et les développer, parce que le besoin est là.

(…) c’est bien là que se situe notre action en tant que bibliothèques publiques, au cœur des pratiques de lecture et d’écriture, c’est là le cœur de notre métier. Le choix des publics, les actions envisagées, les moyens à mettre en œuvre, les partenaires à solliciter, tout cela ne dépend que des choix de chacun au service d’un objectif commun.

Ces projets pluriannuels sont une étape, la première mise en place d’une action structurée, réfléchie et pensée en fonction de l’environnement, des publics et de leurs besoins, qu’ils soient individuels, associatifs ou institutionnels. Ces projets vont s’intégrer dans les plans pluriannuels de développement que chacune des bibliothèques devra coucher sur papier en un ensemble structuré et cohérent.

Ce qui importe avant tout dans cette notion de développement, c’est la notion de changement. Quels changements voulons-nous apporter en termes de pratiques de lecture ? Car c’est bien là que se situe notre action en tant que bibliothèques publiques, au cœur des pratiques de lecture et d’écriture, c’est là le cœur de notre métier. Le choix des publics, les actions envisagées, les moyens à mettre en œuvre, les partenaires à solliciter, tout cela ne dépend que des choix de chacun au service d’un objectif commun.

Demain, le nouveau décret sera d’application, on peut le supposer du moins. Le précédent décret avait permis à la lecture publique un énorme bond en avant, celui de la professionnalisation, de la rigueur, de l’efficacité et de l’organisation. Le présent décret va lui aussi provoquer un nouveau bond en avant, qui sera une nouvelle remise en question de nos méthodes de travail mais qui à terme devrait installer plus encore les bibliothèques comme partenaires incontournables du développement culturel.

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