- Christine Pagnoulle,
secrétaire d’ATTAC-Liège
Une fiscalité juste, source de financement des services publics
Les budgets successifs ont raboté le financement des services publics ; c’est particulièrement flagrant pour les transports et les soins de santé, où la logique managériale s’impose jusque dans le vocabulaire. Or, un service public n’est pas une entreprise commerciale. Comme nous le rappelait en 2007 notre ami Englebert Renier, les services publics sont des services organisés par les pouvoirs publics dont la fonction est de mettre à la disposition de tous des biens immatériels et matériels gratuitement ou à un prix inférieur à leur coût de production.
Voilà qui rend particulièrement scandaleuses les déclarations d’une soixantaine de personnalités1 vantant l’efficacité du secteur privé, « flexible et réactif » et déplorant les « déficiences » du secteur public ; les signataires, qui constatent « l’impuissance publique, jusque dans la fonction régalienne de protection des citoyens », admettent que c’est la conséquence de « choix faits depuis des décennies ».
Il est évident que pour faire fonctionner correctement ces services, il faut les financer par les cotisations à la sécurité sociale et par la fiscalité. De façon prévisible, les auteurs de la tribune du JDD précisent qu’à leurs yeux « la fiscalité doit se faire plus légère et incitative ». Ils reconnaissent qu’il faut valoriser, mieux rémunérer, mais avec quel argent s’il ne faut pas alourdir la « charge » fiscale pour les riches ? Celui, sans doute, qui serait récolté par l’une ou l’autre taxe ou accise, sur l’énergie par exemple, qui va frapper tous les contribuables, donc beaucoup plus durement ceux qui vivent de bouts de ficelle.
Les mesures à prendre en matière de fiscalité sont bien connues et fort simples. Il faut rétablir des taux d’imposition élevés sur les tranches de revenus les plus hautes ET globaliser les revenus (revenus du travail et revenus mobiliers au même taux progressif, sans précompte libératoire !). Dans le même temps, il faut relever le seuil à partir duquel l’impôt s’applique et baisser la TVA sur les biens et les services de première nécessité comme l’eau, l’énergie.
L’imposition des sociétés doit également être modifiée. Actuellement, les entreprises multinationales se servent de leurs filiales pour éluder l’impôt. Il faut les obliger à fournir des rapports pays par pays (nombres de travailleurs, chiffre d’affaires, bénéfice) et introduire un impôt international unique payé dans chaque pays en fonction des chiffres fournis (comme négocié par l’OCDE). Du côté des cotisations à la sécurité sociale, il faut cesser de prévoir des exceptions d’ordre divers qui sont autant de cadeaux fiscaux.

Il faut introduire un impôt sur les plus-values boursières et les transactions financières en général (y compris en devises).
Enfin il faut combattre efficacement tant l’évasion que la fraude fiscale. Depuis des années, les médias étalent des scandales fiscaux sans autre conséquence que des transactions libératoires qui évitent toute poursuite pénale. Il faut supprimer dans la législation les possibilités de niches qu’exploitent les conseillers. Il faut aussi dénoncer les organisateurs de ce crime à grande échelle, au premier chef, les Big Four, ces quatre cabinets d’audit et de conseil, qui remplissent tout à la fois le rôle de commissaires aux comptes et de conseillers fiscaux. Les agents nécessaires à la mise en œuvre de ces détournements sont des avocats fiscalistes, des experts comptables, des réviseurs d’entreprise. ATTAC-Bruxelles2 et ATTAC-Liège ont introduit des plaintes déontologiques contre deux avocats d’affaire et un expert-comptable auprès de leur Ordre et Institut respectifs, dénonçant des pratiques contraires aux règles de leur profession. C’est une action déterminante qui peut être suivie d’effets. La démarche est simple, gratuite et sans risque2.
Pour en savoir davantage sur ce qu’ATTAC-Liège souhaite en matière de justice fiscale, nous vous invitons à consulter les sept émissions organisées dans le cadre du Festival Justice fiscale par le CNCD et le Réseau pour la justioce fiscale.
liege.attac.org/2020/05/25/digit-festival-justice-fiscale/
- Journal du dimanche, 25 avril 2020.
- Pour les particuliers, rendez-vous sur la page d’ATTAC-Liège qui reprend la procédure : liege.attac.org/2020/05/09/porter-plainte-la-marche-a-suivre.
Pour les associations, contacter info@liege.attac.be.