L’avènement de l’homme amortel et athée ?

  • Xavier De Schutterhistorien des religions et collaborateur scientifique à l’ULB
Il serait réducteur de ramener la religion à sa seule dimension eschatologique1. Il n’empêche que la promesse de survie constitue, selon les mots de Jankélévitch, « le désir métaphysique par excellence ». Schopenhauer exagérait à peine lorsqu’il écrivait que « toutes les religions sont, au premier chef, l’antidote que la raison (…) produit, par ses ressources propres, contre la certitude de la mort ». [...]

«Mourez et nous ferons le reste»

  • André Thonnardancien directeur du Centre funéraire de Robermont
La mort est un commerce florissant. Son marché mobilise et génère des sommes d’argent considérables, aiguise bien des appétits et suscite bien des convoitises. En guise de témoins de ce succès : la consultation des sites internet des entreprises funéraires, les « pages jaunes » des annuaires téléphoniques, les annonces nécrologiques des journaux (où il n’est pas rare de trouver trois fois le nom de l’opérateur funéraire pour une seule fois celui de la personne décédée), les spots publicitaires radiophoniques et télévisuels auxquels se risquent même à collaborer des représentants du show-business, les suppléments gratuits des quotidiens ou des hebdomadaires, sempiternels « marronniers » qui refleurissent chaque année aux environs de la Toussaint, les « offres » de contrats d’obsèques, d’assurances-décès ou d’aides au financement proposées jusqu’à nos boîtes aux lettres par les institutions bancaires et les compagnies d’assurance, les salons ou expositions funéraires qui ne sont plus réservées uniquement aux membres de la corporation. [...]

Les « mystères » de la mort

  • Charles Susanneprofesseur honoraire d’anthropologie à l’Université libre de Bruxelles
Devant les angoisses de la vie, et surtout de la mort, les êtres humains ont de tout temps élaboré des visions d’un monde de l’au-delà et ont envisagé des forces magiques. Les êtres humains ont souvent inventé des dogmes les plus invraisemblables pour expliquer des phénomènes les plus évidents. Toutes les civilisations humaines se sont interrogées sur l’origine de la vie et sur les « mystères » de la mort. Les réponses ont toujours été simples et donc rassurantes : la genèse est l’œuvre des dieux. Le biologiste — qui analyse la complexité de la vie et de son évolution — peut, par conséquent, apparaître dérangeant. Les religions judéo-chrétiennes sont dualistes, envisageant un corps matériel et mortel et une âme immatérielle et immuable. Pour l’église catholique officielle, c’est encore le cas, puisque, lorsque Jean Paul II déclarait que l’évolution était « plus qu’une hypothèse », il n’impliquait que le corps matériel et pas l’esprit immatériel. Les scientifiques chrétiens estiment cependant que la notion d’âme doit être repensée au vu des connaissances neuro-biologiques. Le discours religieux moderne remplace l’erreur par la confusion. [...]