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Barbara Goffin,
chargée de projets à BrusselsDonut
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Pierre Paulus,
chargé de communication à Confluences
Le donut aux couleurs Arc-en-Ciel
Rue Vandenpeereboom, à Molenbeek. C'est là, à deux pas de la gare de l'Ouest, que s'est formé voilà tout juste dix ans un groupe d'habitants unis autour d'un projet de logements collectifs baptisé « Arc-en-Ciel ». Rien de très particulier, à première vue. À première vue seulement.
En effet, il s'agit de l'un des deux projets pilotes du Community Land Trust Bruxelles (CLTB) : un modèle aspirant à rendre la propriété des logements plus accessible tout en promouvant l'idée d'une propriété commune du foncier. Autre singularité du projet : le groupe d'habitants qui le porte a travaillé sur l'ensemble de sa conception, en intégrant non seulement les besoins du groupe en tant que collectif, mais également, et plus largement, ceux du quartier. Sans oublier la dimension écologique du projet, qui consiste en une construction passive. Construction qui s'est achevée en 2018… Et, depuis 2020, les logements sont habités.
Le projet Arc-en-Ciel est l'un des trois projets bruxellois à avoir pris part au processus de co-enquête1 conçu par l'équipe de BrusselsDonut, dont la mission centrale est d'appliquer la théorie du Donut à la Région de Bruxelles-Capitale. Ainsi, l'objectif global est de disposer d'un cadre de réflexion adapté à la réalité bruxelloise pour imaginer ensemble, orienter et prendre des décisions cohérentes en faveur de la transition écologique et solidaire vers une société soutenable.
Le projet Arc-en-Ciel est l'un des trois projets bruxellois à avoir pris part au processus de co-enquête conçu par l'équipe de BrusselsDonut (…)
Dans ce cadre, le processus de co-enquête permet un regard rétrospectif sur cet exemple réalisé de Community Land Trust et sur ses impacts. L’approche du Donut permet d’en révéler la pluralité, et les liens qui peuvent exister entre les différents types d’impacts grâce à l’approche des lunettes2 qui prend en compte tant le volet social et écologique que l’aspect local et global des actions et décisions que nous prenons. La co-enquête permet aussi de regarder vers l’avenir : comment accroître encore les impacts du projet en travaillant les dimensions du Donut qui ne sont pas encore touchées aujourd’hui ? De la sorte, le Donut invite à élargir le regard et à envisager de nouvelles actions.
Précisément, dix ans après la création de ce groupe d'habitants et à l'heure où le Donut s'apprête à entrer dans une nouvelle phase à Bruxelles, où en est ce projet et quelles sont ses perspectives ? Nous avons posé la question à Geert De Pauw, coordinateur au sein du Community Land Trust Bruxelles, qui se souvient de l'emménagement des premiers habitants : « C'était juste avant le premier confinement. Pour la plupart, cet emménagement a permis de quitter un logement de mauvaise qualité pour s'installer dans un logement de bonne qualité. Dès le début du confinement, ces personnes étaient heureuses d'avoir pu changer juste à temps… Cela restait malgré tout un défi. Parmi les occupants, on retrouve beaucoup de familles nombreuses, ce qui n'est pas toujours évident… Mais au moins, elles avaient désormais accès à des logements suffisamment grands et de bonne qualité ! »
D'autres défis ont jalonné les débuts et demeurent aujourd'hui. Geert De Pauw poursuit : « Il y a toujours beaucoup de choses à régler les premiers mois, que cela soit au niveau matériel du bâtiment, mais aussi, qui plus est dans le cadre d'un logement collectif, dans le déroulement de la vie, des interactions, au sein du bâtiment. Petit à petit, tout se met bien en place ici. Les gens semblent vraiment contents ! » Et les activités communes, déjà amorcées en temps confinés, prennent un nouvel élan. Dans les reflets du projet Arc-en-Ciel, on retrouve l'organisation de tables de conversation en néerlandais, une école des devoirs, des ateliers autour du vélo, allant de l'apprentissage à la réparation en passant par l'entretien, et encore la volonté de relancer des brocantes de quartier afin de créer davantage de liens avec le voisinage dans les prochains mois.
Parallèlement, Geert De Pauw reste aussi curieux qu'intéressé par la vision et les suites données à l'aventure du BrusselsDonut : « Le travail de co-enquête fut très enrichissant en ce qu'il propose un autre angle pour regarder notre travail. Dans ce travail, l'ASBL Confluences a permis de faciliter les ateliers, de nous encourager à aborder les choses autrement et de pointer des manquements à notre projet. Je pense par exemple à la construction circulaire… Hélas, avec l'augmentation récente des prix des matériaux de construction, nous sommes contraints de revoir nos ambitions à la baisse. Il n'empêche, nous tenons à avancer vers davantage de circularité, en étant notamment accompagnés par Bruxelles Environnement. Ce qui est sûr, c'est que ce travail de co-enquête fut un exercice passionnant ! » Exercice qui, espérons-le, ne fait que commencer.
- La co-enquête est une méthodologie participative développée par l’équipe de BrusselsDonut qui permet d’examiner (avec les acteurs concernés) la compatibilité d’un projet avec le donut, de repérer les freins et les leviers d’une transition sociale et écologique (https://donut.brussels/).
- Il y a quatre lunettes (quatre façons d’observer) – totalement complémentaires et liées – qui croisent les échelles (le local et le global) et les enjeux (le social et l’écologique) et permettent de comprendre les interdépendances (https ://donut.brussels/).