• Véronique Limère
    Véronique Limère
    présidente du Centre d'Action Laïque de la Province de Liège

Le mot de la présidente

Au mois de mai, des mani­fes­ta­tions ont eu lieu dans diffé­rents endroits de Belgique. Nous n’avions plus vu autant de personnes dans les rues de notre cité ardente depuis long­temps. Un vent liégeois de rébel­lion contre… contre quoi exactement ?

Les personnes inter­ro­gées parlent de culture, de liberté, de partage, de se retrou­ver dans un moment festif et de danser pour oublier cette crise. D’un côté, on peut bien évidem­ment comprendre qu’après plus d’une année de restric­tions, la coupe est bien pleine pour certains. D’autre part, les commen­taires fusent égale­ment a contra­rio sur l’inconscience de ces rassem­ble­ments, qui bafouent les mesures sani­taires, qui exacerbent les peurs liées à la conta­mi­na­tion suivie d’une vague qui ne cesse de reve­nir bous­cu­ler nos vies. Une mani­fes­ta­tion contre les consé­quences de ce virus, qui lui-même se nour­rit de nos rassem­ble­ments… Un para­doxe de plus dans cette lutte contre l’ennemi invisible.

Pour préser­ver la vie, on touche à nos liber­tés de mouve­ment, de circu­la­tion, de rassem­ble­ment, de l’accès aux loisirs… On voit s’amplifier les peurs, les inéga­li­tés sociales, fleu­rir les théo­ries du complot, les oppo­si­tions entre les pro – et les anti – de tous bords, etc. Cela me donne parfois l’impression que cette crise nous pousse à hiérar­chi­ser nos liber­tés… Le droit à la vie aux dépens du reste ?

Que l’équilibre de notre société est fragile ! L’homéostasie est la capa­cité d’un système à conser­ver l’équilibre de son milieu inté­rieur (son équi­libre de fonc­tion­ne­ment) en dépit des contraintes externes. Et, quand cette capa­cité est mise à mal, les dysfonc­tion­ne­ments appa­raissent. Ce concept est utilisé notam­ment en biolo­gie et en psycho­lo­gie et peut être appli­qué à ce boule­ver­se­ment que nous vivons depuis plus d’un an. Nos systèmes de vie résis­te­ront-ils à la contrainte de la pandé­mie ? Les indi­ca­teurs de santé mentale, des violences intra­fa­mi­liales, de la préca­rité, nous montrent que cela devient à tout le moins diffi­cile et pour certains, impossible.

Cette crise met néan­moins en évidence des éléments fonda­men­taux dans notre lutte, des piliers qui nous aident dans la tour­mente, tels les services publics, la Sécu­rité sociale, notre système de soins de santé, l’accès gratuit à la vacci­na­tion, l’espoir que ce vaccin pour­rait deve­nir un bien public univer­sel… À l’échelle mondiale, nous voyons malheu­reu­se­ment que, dans d’autres pays, cette pandé­mie soulève les ques­tions doulou­reuses de l’inégalité d’accès aux vaccins et plus géné­ra­le­ment de l’accès à des soins de santé abor­dables et de qualité.

Notre sécu­rité sociale, garante de dignité pour tous et chacun, fruit de luttes, contri­bue gran­de­ment à préve­nir la menace d’une désaf­fi­lia­tion sociale. Elle est l’expression d’une soli­da­rité qui – in fine – doit permettre comme le rappelle le parcours perma­nent du Centre d’Action Laïque de la Province de Liège l’émancipation de tous et de chacun. Tout cela est bien évidem­ment l’objet de notre vigi­lance, à entre­te­nir et surtout à conso­li­der, car rien n’est jamais défi­ni­ti­ve­ment acquis.

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