• Hervé Persain
    Hervé Persain
    administrateur du Centre d’Action Laïque de la Province de Liège

Le mot du président

Le modèle de démo­cra­tie fondé sur les droits humains bat de l’aile de nos jours. Les légis­la­tions natio­nales sont battues en brèche par des accords inter­na­tio­naux de « libre » échange, qui inventent même des cours d’arbitrage censées se substi­tuer aux systèmes de régu­la­tion mis en place pour proté­ger les popu­la­tions des atteintes à leurs légi­times aspi­ra­tions à l’égalité d’accès aux ressources mondiales et à des condi­tions de vie décentes.

Des para­dis fiscaux détournent les ressources finan­cières au profit des plus riches en toute impu­nité, la spécu­la­tion finan­cière dévie les monnaies de leur rôle de mesure des échanges commer­ciaux, et l’on réclame une totale mobi­lité des capi­taux que l’on refuse de plus en plus aux personnes !

Les consé­quences pour l’humanité sont terri­ble­ment domma­geables, par les condi­tions de travail que ces systèmes impliquent lorsqu’ils sont soumis au dumping social et aux délo­ca­li­sa­tions, par les confis­ca­tions de matières premières aux popu­la­tions des pays fragiles qui voient partir des ressources dont elles devraient pouvoir béné­fi­cier, vers des régions mieux dotées et des conglo­mé­rats qui spéculent sur les inté­rêts de ces produc­tions. Dans nos socié­tés occi­den­tales, les actes de soli­da­rité des citoyens envers les migrants sont condam­nés par les lois et pour­sui­vis par les tribu­naux. Les propos racistes, liber­ti­cides qui s’échangent libre­ment au sein des popu­la­tions par les réseaux sociaux au mépris des lois font le lit des régimes popu­listes et ouvrent la porte à l’extrême droite.

 

Comment agir face à ces atteintes à nos valeurs fondamentales ?

 

Comment agir face à ces atteintes à nos valeurs fonda­men­tales ? Dans son ouvrage, La sympho­nie du vivant, le scien­ti­fique et écri­vain Joël de Rosnay nous propose une voie inté­res­sante : l’épimémétique, en s’inspirant du modèle qui nous est offert par l’épigénétique (le préfixe « épi– » signi­fie « au-delà de… »), cette disci­pline qui permet d’étudier l’interaction entre les gènes et leur envi­ron­ne­ment, à la base de l’apparition du phéno­type, c’est-à-dire l’ensemble des carac­tères obser­vables d’un indi­vidu issus de la combi­nai­son de notre patri­moine géné­tique avec le milieu ambiant. Selon lui, tout comme l’environnement, notre mode de vie influe sur les modi­fi­ca­tions géné­tiques, notre « ADN socié­tal » pour­rait évoluer vers une démo­cra­tie parti­ci­pa­tive par l’adaptation des « mèmes », ces unités d’information conte­nues dans notre cerveau et échan­geables au sein de la société (Le gène égoïste, Richard Dawkins).

L’émotion jouant un rôle impor­tant dans le compor­te­ment humain, il préco­nise une approche éthique de nos socié­tés, substi­tuant à l’« info­bé­sité » qui règne aujourd’hui une « infoé­thique » qui permet­trait de déga­ger des valeurs rele­vant de la sagesse, et nous faire passer d’une société de profit à une société de la connais­sance, débou­chant sur un partage de l’information, du savoir et de l’énergie. Et le rôle des mouve­ments asso­cia­tifs, mutua­listes et coopé­ra­tifs serait incon­tour­nable, aux côtés des réseaux sociaux qu’il convien­drait de se réap­pro­prier dans ce sens. Nous passe­rions alors d’une société de l’information à une société de la recommandation…

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