• Evelyne Daniel
    Evelyne Daniel
    vice-présidente du Comité d’Action Laïque de Soumagne
  • Jean Rossi
    Jean Rossi
    Kabongoye – Humanisme et Laïcité Liège-Sénégal
  • Corine Forir
    Maison de la Laïcité de Jupille, Wandre et environs
Propos recueillis par Roland Remacle

« Vivre libres, ensemble », Huit associations rassemblées autour d’un même projet !

Très préoccupés par l’état du monde en général et la multiplication des attentats terroristes en particulier, sujets souvent évoqués lors de réunions se tenant au sein de leurs associations respectives, les membres du Comité d’Action Laïque de Soumagne Elso Cappa et de Kabongoye (Humanisme et Laïcité Liège-Sénégal) ont émis le souhait de ne pas rester inactifs. Conscients que seuls, ils pouvaient peu, ils ont alors pris le temps nécessaire à la réflexion d’un projet commun leur permettant de passer du « Que peut-on faire pour conscientiser à l’intégrisme islamique ? » à « Comment faire comprendre au plus grand nombre que vivre ensemble n’est pas une utopie ? »

Voulant éviter toute stigmatisation, ils ont fait le choix de partir d’un postulat positif, beaucoup plus porteur. S’est alors imposée à eux, comme une évidence, la nécessité de rechercher des partenaires. C’est ainsi tout naturellement vers des amis, tous issus du mouvement laïque, qu’ils se sont tournés et un collectif de sept associations, toutes fédérées au Centre d’Action Laïque de la Province de Liège, a ainsi vu le jour fin 2016. Ce collectif est donc composé du CAL Soumagne et de Kabongoye mais également des comités laïques de Herve et de Fléron-Beyne, du Centre Culturel Arabe en Pays de Liège et des Maisons de la Laïcité de Pepinster et de Trooz.


Entretien avec

Evelyne Daniel

Jean Rossi

Corine Forir

Un collectif associatif pour sortir de l’entre-soi !

Salut & Frater­nité : Pour­quoi s’associer à d’autres asso­cia­tions laïques ?

Collec­tif asso­cia­tif : Il est diffi­cile pour une asso­cia­tion, seule, de déve­lop­per loca­le­ment une action rela­tive au « vivre libres, ensemble ». Invi­ter une person­na­lité laïque, exté­rieure à notre mouve­ment, par exemple étran­gère, amener du monde à son écoute demandent une union de forces et des contacts. Nous avions égale­ment à cœur de sortir du cadre local, des habi­tudes, des certi­tudes, certains diraient de l’esprit de clocher (rires).

Nous sommes persua­dés que la connais­sance des actions des uns et des autres est impor­tante. Cette connais­sance est aujourd’hui peu déve­lop­pée. Par le biais de cette asso­cia­tion, nous espé­rons trou­ver un moyen de renou­ve­ler nos forces vives et de dyna­mi­ser notre action laïque locale. Le lien qui se crée entre asso­cia­tions peut être local ou même très décen­tra­lisé puisque les moyens de commu­ni­ca­tion le permettent faci­le­ment. La nature du lien chan­ge­rait si la proxi­mité géogra­phique n’était plus assu­rée, mais l’intérêt de connaître l’autre asso­cia­tion serait sûre­ment plus grand.

Notre volonté est donc de sortir de l'entre-soi et créer un dyna­misme afin de rayon­ner le plus large­ment possible. Parce que, pour nous, la laïcité est le seul terreau possible pour vivre libres ensemble.

Henri Bartho­lo­meeu­sen et Ghaleb Bencheikh lance­ront, en novembre 2018, un nouveau cycle de réflexion.

S&F : Vivre libres ensemble, pour­quoi ce titre ? Et quelles actions avez-vous déjà menées ?

C.A. : Le vivre libres ensemble n’existe pas encore sur le terrain. La mobi­li­sa­tion de la société doit être totale, ce n’est pas suffi­sam­ment le cas aujourd’hui. Nous souhai­tons ainsi appor­ter notre contri­bu­tion. L’idée du projet était que chaque asso­cia­tion membre du collec­tif, à tour de rôle, assure la concré­ti­sa­tion d’un évène­ment. En avril 2017, une première réali­sa­tion à Soumagne a été la projec­tion-débat autour du film Nos mères, nos daronnes en présence de la réali­sa­trice fran­çaise Bouchera Azzouz. En novembre de cette même année, ce fut la Maison de la Laïcité de Pepins­ter qui prit le relai avec l’organisation d’un dîner-spec­tacle avec l’humoriste belge Sam Touzani et son one-man-show Liberté – Égalité – Iden­tité. Début 2018, nous avons ensuite, dans le cadre du festi­val Paroles d’Hommes, orga­nisé une confé­rence de l’écrivain Vincent Engel et du profes­seur liégeois Pierre Verjans inti­tu­lée L’individu et la collec­ti­vité au 21e siècle. Liberté et responsabilité.

S&F : Quelle est la prochaine acti­vité ? Quel en est l’objectif ?

C.A. : Nous avons le plai­sir d’accueillir désor­mais un huitième parte­naire, à savoir la Maison de la Laïcité de Jupille, Wandre et envi­rons. C’est elle qui pilote cette nouvelle acti­vité. Il s’agit d’une confé­rence qui se tien­dra le 23 novembre à La Cité Miroir avec comme inter­ve­nant Ghaleb Bencheikh (physi­cien et théo­lo­gien musul­man, atta­ché à la sépa­ra­tion du reli­gieux et du poli­tique – Auteur d'ouvrages et d'essais ayant trait à la laïcité) et Henri Bartho­lo­meeu­sen (président du Centre d’Action Laïque). Hassan Bousetta, profes­seur à la faculté de socio­lo­gie de l'Université de Liège, en sera le modérateur.

Avec la nais­sance de DAESH et les attaques perpé­trées par ce pseudo-État contre nos démo­cra­ties, nous avons besoin de comprendre comment une mino­rité de musul­mans avaient pu bascu­ler dans l'horreur. L'important pour nous reste d'éviter les amal­games, de ne pas stig­ma­ti­ser une partie de nos conci­toyens et surtout de réflé­chir à la manière de vivre libres ensemble.

Nous souhai­tons aussi appor­ter notre soutien à un islam libé­ral qui a beau­coup de diffi­cul­tés à se faire entendre. Nous voulons démon­trer que lorsqu'on refuse tout fana­tisme, tout extré­misme, toute violence et que l'on promeut l’esprit critique et la coexis­tence paci­fique des reli­gions et des philo­so­phies non confes­sion­nelles dans une cité démo­cra­tique, il est parfai­te­ment possible de vivre libres ensemble.

S&F : Cette confé­rence est inti­tu­lée « Huma­nisme et spiri­tua­lité. » Pour­quoi ce titre ?

C.A. : Parce que l’humanisme n’exclut pas la spiri­tua­lité et vice versa. Parce que la spiri­tua­lité n'appartient pas exclu­si­ve­ment au monde reli­gieux. Parce que comme le dit André Comte-Spon­ville : « La spiri­tua­lité est la vie de l'esprit, tout pour­rait être spiri­tua­lité. »  Nous voulons montrer que des hommes et des femmes enga­gés dans des courants spiri­tuels diffé­rents, que d'aucuns peuvent consi­dé­rer comme anta­go­nistes, se retrouvent à échan­ger dans un respect mutuel pour construire un monde inclu­sif dans lequel la compro­mis­sion n'a pas sa place et où seul le droit posi­tif régit la Cité.

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