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Robert Moor,
président du Centre d’Action Laïque de la Province de Liège
Le mot du président
La laïcité belge respecte le droit de tout citoyen d’adhérer et de vivre sa religion en paix mais elle précise aussi clairement que les institutions religieuses doivent officier dans le cadre de la sphère privée. Elles ont cependant bien souvent du mal à respecter ce point, car leur vocation prosélyte et leur conviction d’être « la vraie religion du vrai dieu » les poussent à vouloir imposer leur vision restrictive de la vie à toute la société. Par ailleurs, nos sociétés démocratiques affirment la liberté d’expression mais encadrent par la loi la diffamation ou tout discours incitant à la haine, à la violence ou à la discrimination (racisme, négationnisme, etc.).
Ces derniers mois, de terribles événements ont marqué l’actualité. Ils sont emblématiques de l’état d’esprit des fanatiques islamistes : pas de liberté d’expression possible en matière de religion, pas de droit au blasphème pour ces fous de dieu. Mais plus généralement, ce qui est en jeu ici, avec de tels massacres, c’est la volonté des extrémistes religieux d’imposer les préceptes de leur religion à tous, bref d’affirmer que la loi divine prime sur la loi des hommes.
C’est évidemment inadmissible pour les laïques que nous sommes et le comportement de ces fanatiques est terriblement dommageable, en boomerang, pour la très grande majorité des croyants, ici de la religion musulmane, qui se voient alors associés à ces actes insensés. Les journalistes de Charlie Hebdo, visés par le tragique attentat que l’on sait, ont assumé et assument encore leurs convictions de citoyens laïques et libertaires au risque de se voir condamner par la loi des hommes.
Faut-il pour autant provoquer par plaisir les religions ? Non sans doute car il est important d’assurer le bien vivre entre citoyens d’un pays. Pourquoi blesser un ami, dont les convictions sont éloignées des nôtres ? Comme le dit André Comte-Sponville, « Le blasphème fait partie des droits de l’homme. L’humour, des vertus du citoyen1 ». Il n’en reste pas moins qu’il est nécessaire, dans une société démocratique et plurielle, que les religions, comme n’importe quelle idée ou conviction, puissent faire l’objet de débats et de critiques.
Taquinons donc, à l’occasion, nos amis croyants et blasphémons quand l’indignation nous gagne mais, … avec modération, dans le souci du vivre libres, ensemble !
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