• Simone Chaumont
    Simone Chaumont
    présidente de la régionale de Liège du Service Laïque d’aide aux Personnes
Propos recueillis par Roland Remacle

Le SLP : de l’assistance morale à l’accompagnement au deuil…

Petit retour en arrière : le 22 mai 1967, un incendie ravage l’Innovation à Bruxelles. Devant l’indignation des laïques face à l’hommage exclusivement religieux rendu aux quelques 323 victimes se crée le Centre d’Action Laïque. Dans la foulée, les principales associations du pays constituent, dès mars 1970, un nouvel établissement d’utilité publique, la « Fondation pour l’Assistance morale laïque », organisme fédérateur en Belgique francophone et néerlandophone. Son but : assurer l’assistance morale laïque.

Le « Service Laïque d’aide aux Personnes » (SLP) n’est autre que la branche francophone de la Fondation. Il assure l’assistance morale dans les hôpitaux ainsi que les maisons de repos et de soins en Wallonie et à Bruxelles. Dans ce cadre, l’association accrédite et affecte des conseillers et conseillères laïques dans tous les établissements concernés.
Par la suite, la Fondation, dissoute, transmet ses compétences au Centre d’Action Laïque qui donne pouvoir au SLP pour organiser l’assistance morale. En 1998, des régionales du SLP sont ainsi constituées : Brabant wallon, Bruxelles, Charleroi, Liège, Luxembourg, Mons et Namur.

Les conseillers laïques de ces régionales sont également amenés à accompagner des personnes en soins palliatifs, dans le deuil et dans la réalisation de cérémonies de funérailles laïques.


Entretien avec

Simone Chaumont

Le Conseiller laïque, à l’écoute pour mieux accompagner

Salut & Frater­nité : Qu’est-ce qu’un conseiller laïque et quel est son rôle ?

Simone Chau­mont : C’est une personne qui fait de l’assistance morale laïque : elle propose une écoute empa­thique et une aide à déve­lop­per un ques­tion­ne­ment sur soi. Ce soutien est non-confes­sion­nel, au même titre que les autres réfé­rents qui font de l’assistance morale reli­gieuse pour le compte des cultes recon­nus en Belgique. Son travail est évidem­ment basé sur les valeurs laïques, indé­pen­dam­ment de tout dogme et de toute réfé­rence trans­cen­dan­tale. Les conseillers pratiquent l’écoute active, en ce sens qu’ils conduisent plutôt l’autre à réflé­chir. C’est avant tout une démarche frater­nelle et humaine et, en aucun cas, ils ne donnent à la personne de réponses toute faites.

Photo SLP

S&F : Comment contac­ter un conseiller laïque ?

S.C. : La légis­la­tion est très précise à ce sujet : ce sont les patients eux-mêmes qui doivent contac­ter les conseillers laïques. Ainsi, à chaque entrée à l’hôpital ou en maison de repos, ils reçoivent obli­ga­toi­re­ment un docu­ment leur propo­sant la visite d’un réfé­rent de la philo­so­phie de leur choix. La procé­dure est confi­den­tielle. En théo­rie, la demande tran­site par le service infir­mier de l’institution, qui fait alors appel au SLP. Mais dans les faits, les hôpi­taux se contentent souvent d’afficher les coor­don­nées des réfé­rents qui leur sont affec­tés. Ce qui fait que nous sommes de plus en plus souvent contac­tés par les proches du patient ou par le patient lui-même.

S&F : Comment devient-on conseiller laïque ?

S.C. : Il faut intro­duire une demande de candi­da­ture qui doit être accom­pa­gnée d’un dossier compre­nant notam­ment un extrait de casier judi­ciaire. Les admi­nis­tra­teurs du SLP rencontrent alors la personne qui, si elle est amenée à deve­nir conseiller laïque, signera plusieurs conven­tions. Celles-ci lieront les deux parties dans une cadre bien défini. Le conseiller aura dès lors certaines obli­ga­tions telles que se former, répondre aux demandes qu’il rece­vra, etc.

La première qualité d’un conseiller : porter les valeurs laïques. Nous rejoignent surtout des gens qui ont envie d’être utiles en donnant du temps et de l’écoute aux autres.

Actuel­le­ment, nous sommes 19 conseillers laïques pour l’ensemble de la province de Liège et nous couvrons 32 hôpi­taux et quelques 250 maisons de repos. Mais nous sommes ouverts à toute nouvelle candi­da­ture ! Rappe­lons qu’il s’agit d’un volon­ta­riat engagé qui demande certaines quali­tés, connais­sances, réfé­rences et expé­riences de vie. La première qualité d’un conseiller : porter les valeurs laïques. Nous rejoignent surtout des gens qui ont envie d’être utiles en donnant du temps et de l’écoute aux autres. En majo­rité, ce sont des personnes retrai­tées. Cepen­dant, il ne suffit pas d’avoir envie pour être à la mesure de la démarche. Quelle que soit la moti­va­tion des futurs conseillers, nous sommes évidem­ment amenés à former les candi­dats et à les suivre tout au long de leur engagement.

S&F : Quel est le rôle du SLP dans l’organisation de céré­mo­nies de funé­railles laïques ?

S.C. : C’est avant tout un travail d’accompagnement, soit de la personne en fin de vie, soit de la famille et des proches en deuil. La prépa­ra­tion de céré­mo­nie de funé­railles néces­site un travail d’écoute et d’approche. Il arrive égale­ment que nous gardions des contacts avec certaines familles dans le cadre d’un accom­pa­gne­ment au deuil. Il faut savoir que les demandes de céré­mo­nies de funé­railles laïques sont en constante augmen­ta­tion. Beau­coup de personnes que nous rencon­trons découvrent d’ailleurs, au travers de ces céré­mo­nies, qu’il existe une laïcité structurée.

Mon travail consiste dès lors à l’aider à expri­mer sa parole et à cana­li­ser cette émotion dans une certaine forme de dignité. J’ai égale­ment le senti­ment de faire partie d’une équipe, ne serait-ce que pour quelques jours, en tissant un lien équi­li­bré entre la famille, les pompes funèbres et moi-même, et ce afin de réali­ser une céré­mo­nie où chacun se sentira reconnu

S&F : Comment vivez-vous l’organisation de telles cérémonies ?

S.C. : Je me sens utile dans un moment diffi­cile à gérer sur le plan des émotions. Lors de la rencontre avec le conseiller laïque, le solli­ci­teur peut être bloqué émotion­nel­le­ment. Mon travail consiste dès lors à l’aider à expri­mer sa parole et à cana­li­ser cette émotion dans une certaine forme de dignité. J’ai égale­ment le senti­ment de faire partie d’une équipe, ne serait-ce que pour quelques jours, en tissant un lien équi­li­bré entre la famille, les pompes funèbres et moi-même, et ce afin de réali­ser une céré­mo­nie où chacun se sentira reconnu. Mais cette acti­vité m’a surtout permis d’accomplir un chemin person­nel et de connaître et d’approcher la mort sous plusieurs aspects, de déve­lop­per mon écoute et d’apprendre à discer­ner les éléments posi­tifs, même dans les situa­tions fami­liales conflic­tuelles. Je perçois égale­ment un senti­ment de satis­fac­tion et d’accomplissement chez les personnes que je rencontre. Chaque inter­ven­tion, chaque rencontre est une source de réflexions person­nelles et de remise en ques­tion du sens que je donne à la vie.

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