• Audrey Taets
    Audrey Taets
    coordinatrice du service Solidarité

La solidarité, une préoccupation laïque majeure

Le Centre d’Action Laïque de la Province de Liège a mis sur pied un service Soli­da­rité. Aujourd’hui, il prépare un parcours perma­nent sur l’histoire des luttes sociales. Un projet qui met en lumière une préoc­cu­pa­tion laïque essen­tielle : pour être libres, les indi­vi­dus doivent se serrer les coudes et favo­ri­ser les méca­nismes de solidarité.

Pas facile de penser sa vie, de choi­sir sa route, lorsque tout nous est dicté par le logique choix du « néces­saire », du pratique, de ce qui est imposé par l’immédiateté du besoin, parti­cu­liè­re­ment dans une conjonc­ture de crise écono­mique comme celle que nous traver­sons actuellement.

Les ques­tions d’émancipation et d’autonomie, qui sont des valeurs essen­tielles à notre mouve­ment, ne peuvent être disso­ciées des condi­tions maté­rielles néces­saires à leur mise en œuvre. C’est dans cet esprit qu’a été pensé le service Soli­da­rité, car si l’émancipation doit passer par l’existence de condi­tions écono­miques qui la rendent possible, il est impor­tant de s’interroger sur la manière dont fonc­tionne notre système écono­mique ainsi que sur la manière dont est, et a été appré­hen­dée la ques­tion sociale.

CC-BY-NC-SA Flickr​.com – Vydd

Ainsi, le service Soli­da­rité du Centre d’Action Laïque de la Province de Liège mène un travail d’éducation perma­nente sur l’histoire des luttes sociales. Plus spéci­fi­que­ment l’histoire des luttes des « sans-parts »1 qui, face au prin­cipe d’une société basée sur le règne sans partage du marché, ont pris leur  destin en main, en inven­tant leurs propres formes d’émancipation.

A l’heure du déli­te­ment de l’état social, de l’effritement de la société sala­riale2, de la montée du chômage, nous pensons qu’il est essen­tiel et utile de reve­nir sur l’histoire des inéga­li­tés et sur les condi­tions favo­rables à l’émancipation indi­vi­duelle et collective.

Entre Gale­ries et Forges, la soli­da­rité : un parcours sur l’histoire des luttes pour l’émancipation sociale. C’est  donc à ce titre que nous prépa­rons une expo­si­tion perma­nente, qui pren­dra place à Mnema, lieu d’éducation et de culture, dont l’ouverture est program­mée fin 2013.

Il s’agit d’une part, au travers de ce parcours symbo­lique, de repré­sen­ter l’histoire des méca­nismes qui sous-tendent les rapports de domi­na­tion subis par les travailleurs depuis le 19e siècle.

L’histoire des rapports sociaux met en lumière  la manière dont se sont struc­tu­rées les inéga­li­tés sociales au fil du temps. Comment ces inéga­li­tés ont été enté­ri­nées, par des lois, une orga­ni­sa­tion sociale, une idéo­lo­gie, une culture de la distinc­tion mais aussi par l’assignation de toute une commu­nauté à une iden­tité, une posi­tion sociale bien déterminée.

Plus que jamais, il est impor­tant de rappe­ler que le prin­cipe de soli­da­rité sociale ne s’est pas imposé de lui-même, mais qu’il résulte d’un véri­table rapport de force auquel nous sommes toujours inti­me­ment liés. Situer notre deve­nir, au regard d’un récit commun sur les luttes menées pour construire un monde vivable pour tous, permet aujourd’hui de se réap­pro­prier les possi­bi­li­tés bien réelles de notre propre émancipation.

D’autre part, il s’agit  d’exposer les réponses collec­tives qui ont été inven­tées par ceux concer­nés par ces rapports sociaux alié­nants, par ces injus­tices orga­ni­sées ; de montrer les formes d’émancipation poli­tique qu’ont créé les travailleurs pour lutter contre l’ordre social établi et pour agir au sein de la société comme « autre chose » que ce à quoi on les desti­nait. En bref, l’histoire que nous allons racon­ter, c’est  celle de la lutte de deux classes sociales qui s’affrontent pour redé­fi­nir la distri­bu­tion du pouvoir et de la dignité dans la société.

Plus que jamais, il est impor­tant de rappe­ler que le prin­cipe de soli­da­rité sociale ne s’est pas imposé de lui-même, mais qu’il résulte d’un véri­table rapport de force auquel nous sommes toujours inti­me­ment liés. Situer notre deve­nir, au regard d’un récit commun sur les luttes menées pour construire un monde vivable pour tous, permet aujourd’hui de se réap­pro­prier les possi­bi­li­tés bien réelles de notre propre éman­ci­pa­tion.  Il est temps de réaf­fir­mer notre capa­cité à faire chan­ger les choses, à construire un monde commun et surtout de rappe­ler le pouvoir de l’agir collec­tif comme condi­tion pour y parvenir.


  1. Terme emprunté à Jacques Rancière qui quali­fie de « sans-parts » ceux à qui on ne recon­naît pas une égale capa­cité  à parti­ci­per aux affaires de la cité.
  2. Constat posé par Robert Castel dans « Méta­mor­phose de la ques­tion sociale », Fayard, 1995.
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