• Hervé Persain
    Hervé Persain
    président du Centre d’Action Laïque de la Province de Liège

Le mot du président

Le progrès est plus qu’un droit humain, c’est un devoir de l’humanité tout entière ! Il consti­tue même la nature profonde des êtres humains, dans l’évolution de la vie.

Bien sûr, il existe de nombreux freins à l’évolution. La tradi­tion, réfé­rence majeure des reli­gions pour figer les rapports entre les castes supé­rieures et les masses popu­laires, est profon­dé­ment ancrée dans les diverses cultures du genre humain. Et pour­tant, la vie se déve­loppe et évolue toujours vers plus de complexité, néces­saire à son amélio­ra­tion, à la défense et à l’encouragement de la diver­sité, gage majeur de l’évolution.

Fran­cis Bacon, prolon­geant le mythe de la caverne évoqué par Platon, dénon­çait déjà la fonc­tion castra­trice des idoles, obstacles à la connais­sance véri­table : préju­gés, illu­sions, erreurs dues aux limites du langage, auto­rité et systé­ma­ti­sa­tion abusives de certains courants de pensée.

Tout comme lui, Pascal fut le chantre de la théo­rie du progrès, dénon­çant le pouvoir indé­pas­sable des Anciens, alors que, disait-il, les Anciens sont au contraire les repré­sen­tants de la géné­ra­tion présente, les plus éloi­gnés de la nais­sance du monde ! Nous avons béné­fi­cié des apports des géné­ra­tions précé­dentes pour amélio­rer nos connais­sances, notre habi­lité à construire un monde qui néces­site le pouvoir de pensée toujours plus complexe de l’être humain. Certes, tous les choix ne sont pas judi­cieux, et l’évolution ne suit pas une pente recti­ligne, mais progresse selon un parcours sinueux, par une succes­sion de boucles qui nous ramènent en arrière, pour mieux rebon­dir ensuite. Et si d’aucuns nous consi­dèrent tels des nains à côté des géants respec­tés du passé, notre vue porte bien plus loin, car nous sommes juchés sur leurs épaules.

La loi de Hume distingue clai­re­ment les énon­cés descrip­tifs (les faits) des énon­cés pres­crip­tifs (ce qui doit être). La condi­tion fémi­nine en est une excel­lente illus­tra­tion. Est-ce parce que les femmes ont de tout temps été soumises aux hommes qu’elles doivent le rester ? Cela a toujours été comme cela, c’est donc juste et natu­rel ! Hume rétorque qu’entre le fait et la norme, il y a rupture de plan, que l’on ne passe pas ainsi de l’un à l’autre. La valeur prime sur l’être. Voilà pour­quoi une société qui progresse vers plus de droits pour l’ensemble de l’humanité doit l’emporter sur l’immobilisme et la repro­duc­tion des faits du passé. Voilà pour­quoi la morale doit l’emporter sur les reli­gions, car pour l’humain, le senti­ment qui fonde la première doit trans­cen­der la peur, fonde­ment des secondes.

Le Festi­val des Liber­tés donne la parole aux citoyens et est atten­tif à leurs idées, car l’idéal démo­cra­tique moderne est inter­dé­pen­dant de l’échange de ces idées, de la richesse des débats. Nos utopies ne sont pas du ressort exclu­sif de quelques initiés et ne peuvent être défi­nies une fois pour toutes par de quel­conques groupes d’illuminés, mais sont de la respon­sa­bi­lité de la société actuelle tout entière.

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