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Thomas Beyer,
équipe de Réjouisciences
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Marjorie Ranieri,
équipe de Réjouisciences
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Martine Vanherck,
équipe de Réjouisciences
la médiation scientifique comme levier démocratique
Dans un monde saturé d’informations où les savoirs se mêlent aux croyances et où les algorithmes façonnent notre rapport au monde, l’accès aux connaissances scientifiques vérifiées et vérifiables devient un enjeu démocratique majeur. Face aux infox, aux théories complotistes et aux biais cognitifs qui altèrent notre perception du réel, la culture scientifique et l’esprit critique sont, plus que jamais, des outils fondamentaux pour comprendre et agir sur le monde.
L’ambition ? Permettre, par différents types d’actions de médiation scientifique (conférences, expositions, ciné-sciences, ressources pédagogiques, jeux de société), à chaque citoyen de s’approprier les outils intellectuels nécessaires pour évoluer dans un monde complexe. Cette culture scientifique est loin d’être un luxe. C’est un gage démocratique : elle assure à chacune et chacun la capacité de prendre des décisions informées et de participer activement aux débats de société.
Comment lutter contre la désinformation ? Comment maintenir un dialogue serein et constructif entre sciences et société ? Comment faire en sorte que les citoyens ne soient plus victimes de charlatans, de prétendus experts, d’informations non vérifiées ou trop rapidement diffusées ? Opposer une réponse simple à ces questions est une gageure ; tout au plus peut-on esquisser quelques pistes, nourries par une pratique ancienne – et modeste – du partage et de l’animation des connaissances à l’Université de Liège.
Il nous paraît essentiel tout d’abord que la médiation scientifique permette à chacun de comprendre non seulement les résultats de la science, mais aussi ses processus, ses limites, ses remises en question. Il ne s’agit donc pas de présenter la science comme un ensemble figé de certitudes, mais comme un espace dynamique de questionnement, d’expérimentation et de doute. La connaissance ne se décrète pas, elle se construit, et cette construction est profondément humaine : faite de tâtonnements, d’erreurs, de débats, de controverses… autant d’étapes nécessaires à l’élaboration du savoir. En d’autres termes, il s’agit de montrer non pas l’avènement des connaissances scientifiques mais le processus – en toutes ses facettes et en toute sa complexité – d’une pensée critique, d’une démarche dite scientifique. En rendant visible ce cheminement, nous essayons d’offrir aux citoyens une meilleure compréhension du fonctionnement des sciences et de leur ancrage sociétal.

En lien avec cette volonté, il est aussi indispensable de proposer, à travers nos actions de médiation, une expérience systématique de l’altérité. Notre quotidien est de plus en plus calibré et cela nous écarte de plus en plus de contenus, d’expériences qui ne correspondent pas à notre « profil ». C’est d’une certaine expérience de l’altérité dont nous risquons de nous trouver privés à brève échéance. Or, la science est une pratique de questionnement, de doute, d’invention et n’est pas entièrement prévisible ou prédictible. Expliquer comment les êtres humains ont façonné et donné du sens au monde est essentiel pour produire une histoire de la construction de la connaissance en déchiffrant les messages que les objets nous transmettent à travers l’espace et le temps.
Rendre intelligibles les constructions du savoir en toute leur dimension processuelle notamment à travers la matérialité des traces de l’aventure scientifique, c’est, selon nous, contribuer à renforcer un rapport démocratique à la connaissance. En diversifiant les formats et les thématiques, il est plus que jamais nécessaire de mettre les sciences en débat et de faire émerger un dialogue où le public devient acteur.
Si nous voulons que la science reste un socle commun, il est crucial de la présenter comme ce qu’elle est réellement : une entreprise humaine, critique, collective, en perpétuelle évolution. Dans cette optique, la médiation scientifique ne peut se limiter à une transmission verticale, où l’expert délivrerait un savoir à un public passif. Elle doit être une invitation au dialogue, à la réflexion critique, à la participation active. Il ne s’agit alors pas de garantir une vérité définitive, mais d’encourager une posture intellectuelle ouverte, curieuse et exigeante. C’est en intégrant ces dimensions que nous pourrons faire de la médiation scientifique un levier de transformation sociale.
- Cellule de diffusion des sciences et des technologies de l’Université de Liège, Réjouisciences fait de la médiation scientifique le cœur de son travail : elle sensibilise les jeunes et le grand public à l’importance des sciences et des technologies dans nos sociétés, favorise l’accès à la connaissance scientifique et encourage les vocations et les carrières dans les domaines de la recherche et des métiers scientifiques et techniques.

