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Christine Mahy,
secrétaire générale du Réseau wallon de lutte contre la pauvreté (RWLP)
Logement et santé, des inséparables
Le logement est sous baxter. Il est gravement malade ! Mal-logement, non-logement, trop-cher-logement s’accentuent. Et les personnes qui vivent dans le trop peu de tout en subissent en premier lieu les conséquences. Tant que la politique du logement est sous baxter, leur santé l’est également.
La santé physique : les personnes « trop cher logées » par exemple font face à des choix difficiles avec le revenu qui leur reste. L’alimentation devient alors une variable d’ajustement. Et on connaît le lien entre santé et alimentation de qualité. Faute de moyens, ces personnes doivent parfois aussi renoncer aux soins de santé.
La santé mentale : rechercher un logement, subir des discriminations, se faire expulser, déménager… a aussi un impact sur la santé. Vivre dans du logement insalubre, trop étroit, trop froid, trop chaud, trop humide, dans un environnement extérieur bétonné, bruyant ou pollué… ça provoque des problèmes de santé physique mais aussi du stress, de l’anxiété.
La santé sociale : accepter un logement loin de tout, se déraciner, ne pas oser recevoir des invités, ou des services à domicile, se sentir seul·e, abandonné·e… ou au contraire, vivre dans la promiscuité, sans aucune intimité… manquer l’école, des rendez-vous, ne pas recourir à ses droits, … s’auto-exclure par honte, par stigmatisation, ne favorise pas les relations collectives et détruit la santé sociale.
Aujourd’hui, le logement est très fréquemment un lieu où l’on tombe malade, une source de stress, d’isolement, de tensions et d’appauvrissement, alors qu’il devrait être un lieu de sécurité, de stabilité et d’apaisement pour l’ensemble des habitant·es. Les pouvoirs publics se sont jusqu’à présent trop peu emparés de cette question cruciale, laissant trop souvent le champ libre aux investisseurs privés, sans régulation, sans exiger de veiller au bien commun. Le logement reçoit de çi, de là, des aides ponctuelles : il est dépendant d’un goutte-à-goutte. Pourtant, « il est temps de faire la grosse opération ! ». Il est temps de ne plus se limiter à de petites mesures, de s’attaquer aux causes. Avec d’autres acteur·rices, nous plaidons notamment pour : en finir avec la rareté des logements publics sociaux, enrayer la spéculation dans le marché locatif privé, imposer aux investisseurs privés un pourcentage de logements à loyers faibles et modérés, réquisitionner les logements vides, soutenir les rénovations par et pour les ménages à revenus faibles et modestes, loger et accompagner tous les jeunes et les adultes qui quittent une institution pour prévenir l’errance et le sans-abrisme, créer un dispositif de médiation propriétaire/locataire pour éviter les conflits qui mènent à l’expulsion, intensifier le dispositif Housing First (un logement d’abord) qui permet de sortir de la rue, mettre en place des évaluations de l’état de santé de la population au regard de l’état de santé du logement, etc.
Il est temps de pratiquer ces politiques ambitieuses, de retirer le baxter, pour véritablement prendre soin du droit au logement décent, au bénéfice de la santé physique, mentale et sociale des habitant·es
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