• Diane Gardiol
    Diane Gardiol
    Département Etude et Stratégie du Centre d'Action Laïque
  • Sylvie Lausberg
    Sylvie Lausberg
    directrice de la cellule Étude & Stratégie du Centre d‘Action Laïque

Les droits des femmes, des enjeux démocratiques fondamentaux !

La pandé­mie de covid-19 a mis en évidence, encore davan­tage, les inéga­li­tés femmes-hommes et la condi­tion des femmes dans notre pays. Passage en revue de ce bilan désastreux.

Profes­sion­nel­le­ment en première ligne, surex­po­sées à la mala­die et surre­pré­sen­tées dans les secteurs les plus dure­ment touchés par la crise, les femmes ont assumé les tâches de première néces­sité dans les maisons de repos, hôpi­taux et super­mar­chés. Après le travail, c’est à la maison ou derrière les machines à coudre qu’elles ont retroussé leurs manches. Sur le plan person­nel, elles ont, pour beau­coup, renoncé à se faire aider. Malgré l’ouverture des centres de plan­ning fami­lial durant le confi­ne­ment, les demandes de contra­cep­tion ou d’IVG ont baissé de 80 % : soit les femmes n’étaient pas au courant de l’ouverture des centres, soit elles n’avaient pas les moyens de se dépla­cer. Quant aux femmes en situa­tion de pros­ti­tu­tion, elles ont été complè­te­ment igno­rées : aucune mesure d’aide n’a été mise en place.

Une femme dont le maquillage a coulé cache le bas de son visage avec une feuille sur laquelle est dessiné un sourire
© Sydnez Sims – unsplash​.org

La lutte contre les violences faites aux femmes a davan­tage mobi­lisé les poli­tiques qui ont mis en place une task force dès le début du confi­ne­ment. Malgré une volonté poli­tique de plus en plus affir­mée dans les instances fran­co­phones, le constat est effrayant : les appels à la ligne d’Écoute violences conju­gales ont augmenté, suivant les régions, de 70 % à 80 % ! Ce dossier doit deve­nir une prio­rité natio­nale, le confi­ne­ment n’a fait que révé­ler l’ampleur de ce fléau qui touche énor­mé­ment de femmes et d’enfants, dans toutes les couches de la société. C’est en profon­deur qu’il faut chan­ger les menta­li­tés, pour éradi­quer cette violence dont la pointe de l’iceberg est le nombre constant de fémi­ni­cides : en moyenne deux par mois, confi­ne­ment ou pas. 

L’homme le plus pauvre de Wallo­nie reste une femme : une préca­ri­sa­tion exacer­bée par la crise. Plus de 80 % des personnes cheffes de familles mono­pa­ren­tales sont des femmes, et 46 % de ces familles ont des reve­nus infé­rieurs au seuil de pauvreté. Un sujet peu média­tisé, et pour­tant indis­so­ciable de la vie des femmes, est le recours aux produits d’hygiène de première néces­sité : la préca­rité mens­truelle a été tota­le­ment absente des discours liés aux mesures sani­taires. Ce sont les asso­cia­tions qui, face à ce constat ont récolté et distri­bué des kits hygiène, des masques, du gel hydro­al­coo­lique et même du savon, trop cher pour certaines femmes et familles1 . 

La crise de la covid-19 a mis en lumière un constat alar­mant : les femmes préca­ri­sées se trouvent dans l’incapacité de se procu­rer des produits d’hygiène de base, elles sont réel­le­ment dans un état de détresse. Pour faire face à cette situa­tion, le Conseil des femmes fran­co­phones, en parte­na­riat avec la Fédé­ra­tion des Maisons de la laïcité et Picar­die Laïque récoltent ces produits pour les redistribuer.

Appel et points de dépôts (en province de Liège :
aux maisons de la laïcité d’Angleur et de Saint-Nicolas).

www​.fdml​.be/​s​o​l​i​d​a​r​i​t​e​-​f​e​m​mes

Moins média­ti­sés, plus incons­cients et ancrés dans les menta­li­tés, les stéréo­types et les injonc­tions faites aux femmes sont révé­la­teurs du degré de sexisme de notre société. Le confi­ne­ment a renforcé l’inégale répar­ti­tion des tâches dans les couples et familles, et donc les charges mentale et émotion­nelle qui pèsent sur les femmes. Contrai­re­ment à ce que nous pour­rions penser, le harcè­le­ment de rue et le senti­ment d’insécurité des femmes dans l’espace public ont égale­ment augmenté, malgré les restric­tions de déplacement.

En conclu­sion, ce que révèle à nouveau cette crise, c’est que la réali­sa­tion d’une égalité réelle entre les femmes et les hommes ne peut plus attendre. Les droits des femmes sont des enjeux démo­cra­tiques fonda­men­taux : beau­coup de respon­sa­bi­li­tés, de tâches et de services sont pris en charge par les femmes. L’État doit le recon­naitre et valo­ri­ser tant le travail fourni que les citoyennes qui ne comptent ni leurs heures ni leur enga­ge­ment pour assu­rer le bien-être de la collectivité.

Plus géné­ra­le­ment, il est urgent d’améliorer l’information et l’éducation à la non-discri­mi­na­tion envers les filles et les femmes. Toutes les géné­ra­tions doivent être sensi­bi­li­sées sans relâche à cet enjeu de société majeur, par des campagnes de sensi­bi­li­sa­tion et d’information, la détec­tion précoce de toutes les formes de violences et une meilleure appli­ca­tion du droit.

L’égalité entre hommes et femmes est une obli­ga­tion pour les 189 pays, dont la Belgique, qui ont rati­fié la Conven­tion sur l’élimination de toutes les formes de discri­mi­na­tion à l’égard des femmes, adop­tée en… 1979. Alors, qu’est-ce qu’on attend ? ♣♣♣


  1. www​.fdml​.be/​s​o​l​i​d​a​r​i​t​e​-​f​e​m​mes.
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