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    Collectif de Résistance Aux Centres Pour Étrangers (CRACPÉ)

Face aux centres fermés, résistance !

(texte réduit)

DUDH

Article 14

1. Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l'asile en d'autres pays.

2. Ce droit ne peut être invoqué dans le cas de poursuites réellement fondées sur un crime de droit commun ou sur des agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies.

Fin novembre 2006 quatre gardiens du centre fermé de Vottem dénon­çaient dans les médias une partie de la face cachée de la poli­tique d’asile et d’immigration menée par les gouver­ne­ments succes­sifs en Belgique depuis les années 90 : les atteintes inac­cep­tables à la dignité humaine, les maltrai­tances et mauvais trai­te­ments mis en œuvre dans ces centres fermés pour étran­gers. Leurs témoi­gnages éclai­raient en parti­cu­lier le sort réservé aux personnes déte­nues malades ou atteintes de troubles psychia­triques : place­ment en isole­ment au cachot, sans soins, pendant des jours, voire des semaines ! Ce sont ici des faits parmi les plus graves qui ont été dénoncés.

Mais ce qu’il faut savoir, c’est que maltrai­tances, trai­te­ments inhu­mains et dégra­dants consti­tuent la réalité quoti­dienne des expul­sions et des centres fermés. La violence y est bana­li­sée : il s’agit de centres de rapa­trie­ment qui ont comme fonc­tion de prépa­rer l’expulsion et de briser toute résis­tance à celle-ci. Ainsi chaque jour des personnes qui résistent, se rebellent, sont mises en isole­ment et au cachot, à Vottem et dans les autres centres. La veille d’une tenta­tive d’expulsion, les personnes sont systé­ma­ti­que­ment placées au cachot. Des personnes déses­pé­rées en arrivent à des tenta­tives de suicide ; elles aussi se retrouvent au cachot…

(…) maltrai­tances, trai­te­ments inhu­mains et dégra­dants consti­tuent la réalité quoti­dienne des expul­sions et des centres fermés. La violence y est bana­li­sée : il s’agit de centres de rapa­trie­ment qui ont comme fonc­tion de prépa­rer l’expulsion et de briser toute résis­tance à celle-ci

Les centres fermés pour étran­gers, déni de démocratie

Faut-il rappe­ler que dans les centres fermés pour étran­gers se trouvent des personnes qui n’ont commis aucun délit, que ces centres sont en réalité des prisons, ou « camps de la honte… » ? Que la déci­sion gouver­ne­men­tale de leur multi­pli­ca­tion date de 1992 (en 1988, un seul centre le 127 à Mels­broek-aéro­port), crimi­na­li­sant l’étranger, conces­sion faite au programme du Vlaams Blok de l’époque ? Que des enfants sont déte­nus et souffrent, que la Belgique ne respecte pas la Conven­tion des Droits de l’Enfant ? Que l’actuelle poli­tique restric­tive en matière d’asile et d’immigration signi­fie l’expulsion vers la dicta­ture, la guerre, la misère… au mépris des attaches qui ont été créées en Belgique. Régu­liè­re­ment, des déte­nus mènent des actions de grève de la faim, allant jusqu’à mettre leur vie en danger simple­ment pour pouvoir être enten­dus et expli­quer pour­quoi ils refusent leur expulsion…

Une poli­tique qui génère la clandestinité

De par le monde, tous ceux qui craignent les persé­cu­tions conti­nue­ront à cher­cher asile. Tous ceux aussi qui sont les victimes des guerres, de la misère ampli­fiées chaque année par la mondia­li­sa­tion de l’économie et l’exploitation du Sud par le Nord… Bien­tôt s’y ajou­te­ront les victimes des catas­trophes clima­tiques. La plupart d’entre eux restent proches du pays d’origine, se réfu­giant dans un pays voisin. Certains risquent leur vie pour parve­nir à fran­chir les barrières de « l’Europe-forteresse » (…).

Ces centres fermés créés pour dissua­der, n’empêcheront personne de cher­cher asile chez nous, mais ils dissuadent d’entamer les démarches pour obte­nir le droit d’asile ou le droit au séjour.

En Belgique, et dans d’autres pays de « l’Europe forte­resse », parce qu’ils ne peuvent obte­nir le droit au séjour, ils n’ont d’autre choix que la clan­des­ti­nité qui résulte de l’échec des diffé­rentes demandes d’établissement, ou de l’absence de demande par peur des centres fermés et des expulsions.

Ces centres fermés créés pour dissua­der, n’empêcheront personne de cher­cher asile chez nous, mais ils dissuadent d’entamer les démarches pour obte­nir le droit d’asile ou le droit au séjour. C’est ainsi que le gouver­ne­ment peut se féli­ci­ter de la baisse du nombre de demandes d’asile intro­duites ces dernières années. Or, la clan­des­ti­nité, c’est la préca­rité, et souvent l’exploitation, par diffé­rents réseaux.

Nous souli­gnons que de manière cachée, l’économie belge (agri­cul­ture, construc­tion, textile, horeca…) se nour­rit quoti­dien­ne­ment de cette exploi­ta­tion sans que les patrons des firmes ne soient jamais réel­le­ment inquié­tés. Face à cette situa­tion, l’urgence de la mise en œuvre d’une poli­tique de régu­la­ri­sa­tion s’impose !

Avril 2007 - n°58

Publié dans Salut & Fraternité n° 58, Élections législatives : les enjeux, avril-mai-juin 2007, p.4.

Robert Moor
Président (Depuis 2015)

Le centre fermé de Vottem est une prison

En tant que président du CAL Province de Liège, j’ai d’ailleurs eu comme opportunité d’y entrer à l’appel du CRACPÉ, pour apporter des cartes téléphoniques aux prisonniers. Le centre fermé, ce sont de hauts grillages et des procédures de sécurité à chaque étape. Tout rappelle le système carcéral. C’est un centre d’enfermement destiné à des hommes et à des femmes dont le seul tort, le seul crime, est de ne pas correspondre aux critères adéquats pour rester  en Belgique. Les centres fermés sont l’antichambre
vers le retour forcé. C’est aussi un signal gouvernemental pour les migrants qui veulent venir en Belgique : « vous n’êtes pas les bienvenus et risquez fort d’être emprisonnés et expulsés » ! C’est inadmissible.

Ainsi, la question des migrants reste irrésolue. Les personnes sans-papiers sont condamnées à vivre en marge de la société dans des conditions épouvantables et à travailler au noir. Ils vivent constamment dans la crainte d’être « raflés » ! C’est hélas le modèle communément admis en Belgique mais d’un point de vue
démocratique et en regard de la Déclaration universelle des droits de l’homme, cette attitude reste totalement inacceptable.

Alors que la majorité de la population détourne le regard face à la réalité des personnes migrantes, souvent les personnes qui voient la réalité de plus près changent de regard. En ce sens, l’éclairage régulier du CAL
sur cette thématique dont la récente exposition Frontières fait oeuvre utile pour changer les points de vue. Quand le migrant n’est plus un anonyme mais une personne, avec femme et enfants, une histoire, une culture, il est alors seulement accepté par les citoyens belges.

Réjouissons-nous aussi de la récente décision du Conseil communal de la Ville de Liège de s’inscrire comme Commune hospitalière, prévoyant logements, écoles, accueil pour les nouveaux arrivants.

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